Cténophore ma chérie (My Darling Comb Jelly) French version – translated by Catherine Renee Piquemal

toi

 

Le silence de la mer

Sans un souffle

Sans une marée

Te retiens, te soutiens

 

Le ciel et la mer la mer et le ciel

Te cachent

 

Tu es plus délicat qu’une pique à cheveux faites de porcelaine

Fait comme d’une seule bobine et d’un seul fil

Rendu plus unique encore qu’un flocon de neige

 

Magnifique, hors du commun, beau

Tu es le soleil brulant de midi

Tu me noircis et me brûles les lèvres

Tu m’étouffes

Tu chauffes mon cœur jusqu’à qu’il en devienne aussi sec que la poussière

 

Tu es la lune crevassée et pâle

Ton sourire de craie froid et argenté

M’écartèle

Faible mes yeux hagards tournés vers toi

Tu me tires vers le plus haut sommet de ta plus haute vague

Juste pour me fracasser soûle vers tes récifs coupants

 

C’est la vie même qui goutte à goutte soupire et se force à travers ton corps si petit, à l’insu

Mille naufrages et des milliers de vagues sont venus vaciller à tes pieds

Et t’ont fait leurs révérences

Des milliers et des milliers de choses gluantes ont survécues

Entre tes doigts de pieds

Alors que tu dansais

 

Avoir l’honneur de ta présence majestueuse pour juste un moment

Me durerait toute une vie

J’en garderais l’image dans un vase de Crystal au plus profond de mon ventre

Me respiration retenue

Dans cet instant même je n’y verrais pas seulement toi, mon amour mais l’éternité des éternités/la durée de vie de toute les durées de vie.

Parce que cet à tout jamais (ce pour toujours) est en toi

Toutes les (chaque) voix de tous les rois et toutes les reines

Et le pire des tempêtes d’hiver

Toutes ces journées d’été gémissantes de chaleur et remplies de mouches

L’abysse même pourri à tes pieds

L’eau comme des potions de sorcières attend tes ordres

Les oiseaux planent silencieux jusqu’à que toi tu parles

 

Tu m’éblouis

Je me rapetisse d’émerveillement, de peur, d’admiration

Je m’évapore

Comme tu es courageux et comme tu es intelligent

Comme tu es jubilatoire

Les sommets enneigés des montagnes qui traversent le ciel pour aller toucher le soleil ont une idée de ce que tu es

L’hirondelle qui année après année accompli son voyage épique pour venir faire son nid au dessus d’une porte a une idée de ce que tu es.

 

Si seulement tu pouvais voir mon amour,

Tu pourrais voir dans mes yeux les ombres de tant d’années

De douce souffrance

Tu me verrais seule, la, dans une mer si vaste, si vaste

Aussi désœuvré en amour qu’un bateau de peinture voguant sur un océan de peinture (qu’un bateau peint sur un océan peint).

 

le Voyage

 

J’ai marché jusqu’à la mer couleur de vin rouge et sombre pour te trouver.

Chaque pas me brulait (me marquant au fer rouge)

Chaque fois que je clignais des yeux mes paupières me griffaient et m’aveuglaient

J’ai arpenté des chemins tortueux comme des cicatrices dans la peau sèche et craquelée de la terre

Les ailes ensoleillées des insectes virevoltant devant mes yeux

Les abeilles et les taons me piquaient

Les fougères me griffaient et me déchiraient les chevilles

Les vers aveugles et froids retournaient dans la terre quand ils m’entendaient m’approcher

Les oiseaux chantaient leur hymne réservé normalement à l’après d’une averse d’été

Et les lézards squelettiques me faisaient sursauter.

 

Maintenant que je suis dans tes eaux vertes, bleues et blanches intenses

Mon âme est à l’agoni

Je me languis de partager ton silence et tes longues heures de solitude

Parmi les sons étranges des nuits de silence

Donne-moi un signe

Montres moi comment notre amour peut s’abandonner ou s’élever.

Qu’il ne connait aucune limite

Aucuns devoirs

Oses m’exciter par ta beauté

Oses me rendre euphorique

Enchantes-moi

Inspires-moi

Encourages-moi

Récompenses-moi

Je t’en supplie mon cher et tendre amour

Laisses ma misérable âme t’admirer (te regarder).

 

moi

 

Je veux te sentir à l’intérieur des cellules de mon sang

Je te veux dans ma morve

Je veux ta bile sur ma langue

Je veux goûter le plus profond de toi

 

Enfoncer tes ongles au plus profond de mes pommes de mains

A les en faire saigner

Vis sur moi et de moi comme une tique

Sois mon parasite

 

Je veux lécher ton âme

Et sucer ton cœur

Garder ton haleine dans ma bouche

Goûter le trop plein qui suinte de tes reins

 

J’ai besoin de toi pour mon langage

J’ai besoin de toi pour mon air

J’hurle

J’ai mal au cœur

J’ai la rage

Mendier est pour les mendiants et pour moi

Misérable et sans aucune valeur

Je me désole

Je me blâme des milliers de fois car tel est mon état

Je suis (devenue) cette excuse

 

Comparé à ma souffrance la flagellation est un confort

L’arsenic un tonic

Le goudron chaud sur ma langue une friandise

Laisses-moi savourer les plumes

Afin que je puisse les recracher et m’étouffer doucement en extase

Rempli ma gorge de ciment

Jettes de l’acide dans mes yeux

Cloques la totalité de ma peau avec des liquides brûlants

Et puis éponges mon pus avec du fil de fer barbelé

Echaudes moi avec de la mélasse bouillante et puis arraches ma peau calcinée avec des couteaux brulants

Pour te donner du plaisir mon amour ces choses je les endurerai

 

Pour te donner du plaisir je danserai pieds nus autour de la terre

Pendant des milliers et des milliers de nuits gelées et de journées écrasantes de soleil

Mes doigts de pieds sanglants d’engelures et de cloques

Pour un seul sourire de toi je forcerai mon intérieur à l’extérieur comme un pull qu’on retourne.

Et puis mangerai ce qu’il en reste de moi

Encore et encore

Je le ferai ça

 

Pour juste un mot je boirai tous les océans de la terre

Et mourrai assoiffée par le sel

 

Pour toi je coulerai au fond du plus profond des océans qu’il reste encore à découvrir –

Où le noir est plus noir que l’obscurité même

et plus froid que la froidure même

Où les couleurs ne sont que des souvenirs et la lumière une plaisanterie

Tout en bas aveugle

J’oserai cligner des yeux seulement une fois juste pour me rappeler qu’autrefois j’avais des yeux

Tout en bas sourde

Même plus d’oreille à faire sonner

Ma chair suspendue à mes os creux

Tremblant seulement qu’en une autre forme de vie passerai à coté

Ou qu’en la terre tire

Une forme que je pense j’ai été autrefois

Et se désintégrerait si touchée

Des créatures étranges inconnues et terrifiantes se nourriront de moi

 

 

Je ne suis plus

Et ce pour toi,

Mon amour

Et ce pour toi

Pourrie, aveugle et sans couleur

Froide

Un souvenir

 

mourir

 

Je peux te chatouiller les doigts de pieds ?

Je peux te grignoter ?

C’est bruyant dans ton oreille ?

 

Je croyais t’avoir entendu m’appeler

 

Bleu puis bleu puis bleu puis bleu

 

Des yeux des oreilles qui forcent, ils sont à moi ? Je peux les forcer ?

Je ne les sens pas et ne m’en rappelle pas

C’est à moi ce membre, je peux le bouger ?

C’est ça ma volonté ?

C’est de l’eau là ?

Où c’est de l’air ?

Pourquoi c’est partout autour de moi ?

Je me noie là ?

C’est ça la vie ou c’est la mort ?

Je suis toi ou tu es moi ?

 

Je suis en train de faire mon passage la?

 

Je croyais que j’allais peut être voir une lumière, une fissure juste là..maintenant

 

C’est pas comme si….

 

Si je suis encore là c’est parce que je continue de t’appeler

Dans une langue étrangère

Pour toi

 

Là-bas

 

les lamentations

 

J’aurais écaillé une tranche argentée de la lune pour toi

J’aurais écaillé chacun de mes ongles pour toi

Et trainé le bout de mes doigts écorchés sur la surface de la terre pour des centaines de milliers de kilomètres

J’aurais souri un sourire édentés et sanglant pour toi

Dans l’ombre longue de ton absence

 

J’aurais rattrapé les reflets du soleil

Et les aurais placés devant toi jour et nuit

Pour t’offrir l’image de mon cœur qui brûle

J’aurais bu toutes les gouttes de vin du monde pour toi

J’aurais rattrapé toutes les gouttes de pluie sur ma langue pour toi

Je t’aurais ramené toutes les berceuses des bébés éveillés

Rattachés par une mèche de mes cheveux

 

J’aurais empêché la terre de faire de l’ombre à la lune

J’aurais retiré les épines des roses

J’aurais changé les couleurs du martin-pêcheur

J’aurais changé la forme des feuilles du trèfle

J’aurai donné au papillon une chanson

Et les vers des yeux

Si tel était ton souhait mon amour

 

La mousse s’est amassée

Le printemps n’a pas osé éclore

Au lieu il s’est tapis feuillu

En attente

Les reflets n’ont pas dansé

Les lèvres sont restées sèches

Les yeux ont démangé

Les membres ont fait souffrir

 

Nous avons tous attendu

 

Les ailes poussiéreuses

Les estomacs vides

Les saisons, les chansons, les mers, les étoiles

Nous avons tous retenu notre respiration (nous avons tous cessé de respirer)

 

Eux pas aussi triste que moi

Eux pas aussi fous que moi

 

C’était moi la possédée, la damnée

Salaud

 

le Viol

 

Une centaine de verges énormes en même temps

Toutes ensembles à l’étroit

Qui poussent et qui pressent

Un corps qui évacu

Il n’y a plus de place

Je pleure – je pleure ?

Gorge fermée

Os cassés suspendus à la colonne, peut-être

Ils tournent sans axe

Mou

Dépensé

Tremblant

Des jours et des nuits perdus

Les yeux révulsés

La tête comme morte

Une voix aiguë

Du sang sur les dents

Et partout, en filet

Goutte à goutte à goutte

Je goûte mon cadavre, sucré

Toi

Je méritais ça ?

Dans une souffrance grisante je m’allonge

Et meure encore et meure encore

 

la mort

 

Les soleils et les ciels

Les nuages qui passent

Scintillent et vacillent

D’un côté

Mais de l’autre il y a ça

Oh mon dieu il y a ça

 

Cet endroit

 

Charon n’a pas transporté toutes ces âmes perdus jusqu’à cet endroit

Dante n’a pas parcouru cet endroit

Parce que Dieu n’a pas créé un tel endroit

 

Des choses comme la pourriture, le visqueux et la puanteur

Sont des hors d’œuvres

C’est l’enfer de l’enfer

 

La peau en lambeau est là

Mais à quoi ça appartient ?

Puant Pendant là apathique de tout ce qui est laid

 

Dans un marécage du pourpre le plus sombre

Les êtres boueux se tordent et se mordent

Leurs corps souillés d’ordures

 

Mais aussi putride et infâme qu’il soit cet endroit n’est pas encore né pas encore imaginé

Il n’y a même pas de sang qu’on peut sucer ici

Parce que la vie a disparu depuis longtemps d’ici

respirer, c’est quoi respirer?

 

Je peux parler des vers et des serpents qui suintent des narines, des bouches, des plaies béantes et de la chair déchirée

Je peux peindre des tableaux de toutes les créatures borgnes de l’enfer si laides qu’on ne peut pas les imaginer

Mais elles sont toutes parties

Toute chose abandonne cet endroit

 

La couleur est oubliée (s’oublie)

Le soleil est silencieux

 

Même l’obscurité ne savait pas qu’il pouvait faire si noir

Le gouffre ne savait pas qu’il pouvait être aussi profond

 

Tu me guides vers cet abysse

 

Pas parce que tu me regardes froidement

Pas parce que tu me nies

Mais parce que tu m’offres ce rien

 

Le rien au regard de rien

C’est pour ca que je pourris et croupis ici avec les autres qu’on a oublié depuis longtemps

C’est pour ca que je ne peux pas faire bouger ma pensée

Ou ressentir la fureur engloutissante d’une démangeaison qui ne trouve pas de répit

Ou voir l’étrange lumière amorphe derrières les paupières comprimées

Je n’ai pas (il n’y a pas) de paupières

Ou d’yeux

Ou de mots pour dire qu’il n’ya pas d’yeux et qu’il n’y en a jamais eu

Ou de savoir si je n’ai jamais eu un cœur

Ou le sang froid

Parce que tu ne savais même pas que j’étais ici

Ou là-bas

A te chercher

 

amour

 

Mais l’amour prend pitié des âmes misérables (l’amour est miséricordieux envers les âmes misérables)

Alors je pars sur la pointe des pieds indemne

Je me retourne

Je ricane

Un peu de sel séché sur mes lèvres

Et un petit bleu sur mes hanches

Pour danser encore une fois sur la lune

Pour sauter de nuages en nuages

Pour chanter avec les étoiles

Et ritchouler avec les dieux

 

Un ciel bleu clair

La chanson d’un rossignol

La rosée du matin

Et ma journée la plus longue est finie

 

Mon amour

Mon plus bel amour

Mon très cher et tendre amour

Je te retrouverai si doux, si heureux et pour toujours à moi.